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ESA Université Angers

L’inscription du Repas gastronomique des Français sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité par l’UNESCO le 16 novembre 2010 a activé-réactivé l’intérêt des chercheurs en sciences sociales pour le champ de la gastronomie.

En effet, la gastronomie est devenue une thématique de plus en plus souvent associée aux questions de mise en valeur touristique (tourisme gourmand, émergence de destinations touristiques gourmandes), de développement local (le restaurant comme outil de développement à l’échelle locale, les produits agricoles alimentaires et les spécialités culinaires au cœur des stratégies locales de développement), de processus de patrimonialisation (construction et valorisation des patrimoines gourmands), de nouveaux modes de consommation et de rapports à la table (bio, veganisme, locavorisme) et de dynamiques d’identification culturelle (production de marques territoriales, façonnage d’emblèmes gastronomiques, dynamiques muséales et événementielles).

Se dessinent ainsi des enjeux de positionnements géopolitiques (gastrodiplomatie, soft power), de rayonnement et d’attractivité des territoires, de communication (communication gourmande, réseaux sociaux), d’innovation et d’images (appropriation et diffusion d’imaginaires gastronomiques, food porn).

  • Économie de la table à Rennes à la Renaissance, mi XVe -début XVIIe siècle

    La Renaissance est une période importante pour l’histoire des cultures alimentaires en Occident. Elle marque une transition décisive entre la culture alimentaire médiévale et la modernité culinaire des XVIIe et XVIIIe siècles français. L’étude d’une longue Renaissance (mi XVe-début XVIIe siècle) offre de réelles possibilités de compréhension et d’analyse de cette transition peu étudiée, grâce à des sources plus nombreuses qu’aux siècles précédents, notamment pour la ville de Rennes, capitale de la province bretonne dont les cultures alimentaires demeurent encore largement méconnues. Nous nous sommes appuyés sur la notion « d’économie de la table », comprenant la dimension de la production et des approvisionnements, mais également des choix politiques, ceux d’une fiscalité alimentaire et de la construction d’infrastructures, sans oublier les aspects sociaux avec les règlementations et les modalités de la prise de nourriture par les différentes catégories de la population. Celles-ci sont bien présentes dans nos sources grâce aux nombreuses mises et aux livres de comptes, lesquels peuvent être croisés avec des sources imprimées et les résultats de fouilles archéologiques. Les repas des privilégiés sont les mieux représentés dans notre documentation, avec notamment une économie du don qui est développée et assez encadrée. Certains grands repas de la communauté de ville, surtout pendant la période ducale, ceux de certaines communautés religieuses et des hôpitaux, bien documentés, permettent parfois une analyse sérielle, et laisse entrevoir une culture culinaire et de table variée. L’économie domestique, avec son mobilier spécifique, ses techniques culinaires, ses horaires et son calendrier menso-liturgique fait suite, dans l’analyse, à l’économie productrice et marchande. L’étude se termine par les contraintes religieuses, symboliques et matérielles, lesquelles n’empêchent pas les plaisirs de la table, en gras comme en maigre, notamment pour les privilégiés. Qu’elle soit ordinaire, festive ou extraordinaire, l’alimentation à Rennes à la Renaissance permet à cette thèse d’aller plus en avant dans la reconstitution des choix et des contraintes des différentes prises alimentaires. Elle débouche sur une question d’importance : existe-t-il une identité alimentaire « Renaissante » à Rennes, voire propre à cette capitale ?

    Université Angers
    Pilotes du projet : Hubert DELORME
    Partenaires : Florent QUELLIER (directeur de thèse) et Philippe Hamon (co-directeur)
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  • Soutenance de thèse : ENTRE DISCOURS ET SENSIBILITÉS GUSTATIVES. LE GOÛT DANS L’OEUVRE DE GRIMOD DE LA REYNIÈRE (XVIIIe-DÉBUT DU XIXe SIÈCLE) - 12 janvier 2023

    Soutenance de thèse par Yuka SAITO.

    Soutenance publique : 12 janvier 2023 à 14h.

    Directeur de thèse : Mr Florent QUELLIER

    Composition du jury :

    • Monsieur Philippe BOURDIN, Professeur des Universités Université Clermont-Auvergne, Examinateur
    • Monsieur Didier BOISSON, Professeur des Universités Université d’Angers, Examinateur
    • Madame Mayuho HASEGAWA, Professeur émérite Université de Tokyo, Japon, Rapporteur
    • Monsieur Philippe MEYZIE, Maître de Conférences HDR Université de Bordeaux Montaigne, Examinateur
    • Monsieur Florent QUELLIER, Professeur des Universités Université d’Angers, Directeur de thèse
    • Madame Viktoria VON HOFFMANN, Chercheuse Qualifiée F.R.S.-FNRS Université de Liège, Belgique, Rapporteur

    Résumé de la thèse :

    Cette thèse a pour objet de rechercher la notion de goût et les sensibilités gustatives exprimées dans les ouvrages gastronomiques de Grimod de La Reynière : l’Almanach des Gourmands (1803-1812, 8 volumes) et le Manuel des Amphitryons (1808). Basée sur une approche textométrique, notre analyse porte sur les représentations du goût chez Grimod, en les confrontant avec celles figurant dans d’autres écritures contemporaines, à savoir les livres de cuisine, les traités de civilité et les ouvrages de critique d’art. La textométrie illustre clairement que le discours gastronomique de Grimod tend à juger et à hiérarchiser les aliments. Ce rôle de critique est notamment joué par le Jury dégustateur, qui incarne une faculté du jugement gustatif supposée être infaillible. Inspiré de la critique d’art et des sociétés littéraires du XVIIIe siècle, Grimod invente ce jury composé de gourmands éclairés. S’éloignant de l’image du glouton stigmatisée par la civilité moderne, ceux-ci se manifestent comme dégustateurs professionnels qui participent à la création de la réputation dans le commerce alimentaire. Chemin faisant, le goût sensuel est valorisé afin de le hisser au rang du goût intellectuel. Tout en s’inscrivant dans la sensibilité culinaire du XVIIIe siècle, Grimod met en relief, par cette démarche de légitimation, les produits alimentaires de terroir réputé, les restaurateurs et les commerçants de bouche jugés les meilleurs, dont les noms deviennent des marques. L’auteur joue ainsi le rôle d’un passeur culturel du goût entre les élites françaises de l’Ancien Régime et les nouveaux consommateurs du XIXe siècle, en intégrant le système méritocratique dans le domaine alimentaire.

    Université Angers
    Pilotes du projet : Yuka SAITO
    Partenaires : Florent QUELLIER (directeur de thèse)
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  • Soutenance de thèse : Approvisionnements alimentaires et société dans les campagnes du Nord-Ouest du Bas-Maine au XVIIIème siècle - 24 novembre 2022

    Soutenance de thèse par Véronique BIGNON.

    Soutenance publique : 24 novembre 2022 à 14h

    Directeur de thèse : Mr Florent QUELLIER

    Composition du jury :

    • Monsieur Alain BELMONT, Professeur des Universités Université de Grenoble Alpes, Rapporteur
    • Madame Emmanuelle CHARPENTIER, Maîtresse de Conférence Université de Toulouse Jean Jaurès, Examinateur
    • Monsieur Philippe MEYZIE, Maître de Conférences HDR Université de Bordeaux Montaigne, Rapporteur
    • Madame Anne MONTENACH, Professeure des Universités Aix-Marseille Université, Examinateur
    • Monsieur Benoît MUSSET, Maître de Conférences Le Mans Université, Examinateur
    • Monsieur Florent QUELLIER, Professeur des Universités Université d’Angers, Directeur de thèse

    Résumé de la thèse :

    Cette thèse de doctorat a pour ambition d’approcher le fonctionnement de l’ensemble d’une société rurale de l’Ancien Régime par le prisme de ses approvisionnements alimentaires, dans un contexte de culture de la faim qui fait de l’accès aux subsistances une obsession lancinante. La zone explorée se concentre sur le nord-ouest du Bas-Maine, c’est-à-dire sur la partie de la province qui est la plus proche des frontières normande et bretonne, et la plus éloignée des grands axes de circulation. L’hypothèse d’un beau XVIIIe siècle pour ce territoire apparaît contrasté. Si le modèle productif, grain-élevage-filage assure une certaine sécurité, il porte aussi en lui le germe de la médiocrité des performances agricoles et l’incapacité chronique à subvenir aux besoins alimentaires de la population. Les rendements du sarrasin rythment les périodes de profusion et de pénurie et annoncent les crises alimentaires et sanitaires. Dans cette région, où près de 90 % de la population vit dans des métairies, closeries, ou loges disséminées au milieu des champs, le plus souvent « dans le fond d’une campagne » très éloignée des centres urbains, les approvisionnements alimentaires reposent d’abord sur l’autoconsommation. Pour autant, il apparaît que les lieux de vente accessibles aux habitants des campagnes sont variés, souvent protéiformes, quasiment présents sur tout l’espace, et que la société rurale, dans son ensemble, participe à la fourniture d’aliments, que ce soient les curés, les meuniers, les fabriques, les métayers, les closiers, les marchands, les gros propriétaires, les colporteurs, et même les plus pauvres qui prennent le risque de ramener du sel de Bretagne ou de l’eau-de-vie de Normandie. Si l’habitant des campagnes se satisfait d’un régime alimentaire routinier et frugal à base de lait, de beurre, de pain de sarrasin, de soupe, de pommé ou de cerisé, il a besoin d’espaces compensatoires pour supporter ses privations. Les festins des noces, les ripailles de la fête des rilles ou de la gerbe sont autant de moment à saisir et à vivre pleinement. L’expression de ces festivités dévoile certains traits de l’identité culturelle du Bas-Maine, de même que quelques aliments apparaissent comme des marqueurs sociaux. Enfin, les investigations menées dans les fonds des campagnes du Bas-Maine apportent la preuve d’une culture alimentaire propre, même si elle est partagée avec la Bretagne et la Normandie.

    Université Angers
    Pilotes du projet : Véronique BIGNON
    Partenaires : Florent QUELLIER (directeur de thèse)
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  • Soutenance de thèse : Dynamiques géographiques des destinations touristiques gourmandes. Etude de cas des pays de Savoie.

    Soutenance de thèse par Dénali Boutain

    Soutenance publique : 5 décembre 2022

    Composition du jury :

    • Philippe Duhamel (Université d’Angers), directeur
    • Olivier Etcheverria (Université d’Angers), co-directeur
    • Sophie Lignon-Darmaillac (Université Paris Sorbonne), rapporteur
    • Marco Petrella (Université de la Molise), rapporteur
    • Christine Margétic (Université de Nantes), examinateur
    • Gérard Beaudet (Université de Montréal), examinateur

    Résumé de la thèse :

    Depuis une vingtaine d’années, le tourisme lié à la découverte de ce qui se boit et se mange connaît un fort engouement. Il est plébiscité par les pouvoirs publics et les techniciens du tourisme, à divers niveaux d’échelle. Que ce soit au travers de la création de labels à l’échelle nationale (Vignobles & Découverte), au travers de projets interrégionaux (la Vallée de la Gastronomie) ou à un niveau local, la compréhension de ces dynamiques émergentes revêt un enjeu central. Dans ce cadre-là, les chefs étoilés, par leur notoriété, leur polarisation et leur ancrage local, jouent un rôle central et fédérateur dans les lieux qu’ils investissent et s’approprient.

    Les pays de Savoie (Savoie et Haute-Savoie), réunis au travers d’un outil de promotion touristique commun, l’agence Savoie Mont Blanc, sont parmi les départements les plus étoilés de France. Depuis 2019, la station de Courchevel est même devenue la commune la plus étoilée de France au prorata du nombre d’habitants (Etcheverria, 2019).

    Or, les écrits scientifiques internationaux portant sur ces nouvelles pratiques touristiques liées au boire et au manger ont jusque maintenant largement minoré la dimension spatiale de ces dynamiques.
    Cette thèse propose donc un cadre conceptuel et théorique en sciences sociales des « destinations touristiques gourmandes ». À partir de l’étude de cas des pays de Savoie, nous traiterons de leurs dynamiques actorielles, multiscalaires et immatérielles. Fondée sur une analyse qualitative, ce travail instruit leurs conditions d’émergence et interroge dans quelles mesures le développement local est l’essence même des destinations touristiques gourmandes.

     

    Bibliographie :

    BOUTAIN D. et ETCHEVERRIA O., « Les destinations touristiques gourmandes : approche théorique et cadre
    d’analyse en sciences sociales », Norois [En ligne], 261 | 2021, mis en ligne le 01 janvier 2025, consulté le 13
    octobre 2022. URL : http://journals.openedition.org/norois/11489 ; DOI : https://doi.org/10.4000/norois.11489

    Université Angers
    Pilotes du projet : Dénali Boutain
    Partenaires : Philippe Duhamel (Université d'Angers), directeur & Olivier Etcheverria (Université d'Angers), co-directeur
  • Journée d'étude sur les destinations touristiques gourmandes / 1ères rencontres de Fontjoncouse - 7 avril 2022

    Partout dans le monde, et plus particulièrement dans les sociétés industrialisées, des destinations touristiques gourmandes à géométries variables, révèlent une double réputation à la fois touristique et gourmande, avec l’hypothèse que l’une alimente l’autre.

    Jean-Marie Hazebroucq a montré que le terme destination a « en français, [un] double sens à la fois de « lieu » : « lieu où l’on se dirige, où l’on est dirigé » (arrivée à destination) et de « finalité (du bas latin destinatio), d’usage (le purpose anglo-saxon) (2009). La destination peut donc se comprendre comme le lieu où l’on se rend et l’emploi fait de ce lieu.

    L’approche fonctionnelle des destinations touristiques et l’étude de leur production et de leur marchandisation marque la recherche contemporaine en sciences sociales (Leite et Graburn, 2010, p. 22). En particulier, depuis les années 1980, le champ du tourisme investit largement le terme, notamment pour sa polysémie qui permet d’englober « tout à la fois un lieu à voir, l’objet d’un désir ou d’un rêve, et une organisation capable de réaliser ce rêve » (Kadri, Khomsi et Bondarenko, 2011, p. 12).

    D’un point de vue organisationnel, Kadri, Khomsi et Bondarenko défendent l’idée que la destination est « un ensemble dynamique de projets conçus comme efforts intentionnels et intéressés des acteurs intervenants » (2009, p. 23). Or, toute dynamique implique un mouvement, une évolution, une modélisation spatiale. Alors qu’il s’intéresse au management des destinations touristiques, le géographe Philippe Violier remarque ainsi que « la destination touristique peut être définie à la fois comme une représentation et comme une réalité sur laquelle les touristes sont diversement informés. En tant que représentation, elle ne peut être appréhendée de manière objective comme un lieu ou un territoire, mais seulement à partir de l’image dynamique, puisqu’elle évolue notamment par les pratiques que les touristes s’en font » (page 36). Tout à la fois projetée, conçue, perçue et pratiquée, la destination touristique évolue ainsi au gré des représentations et des pratiques des différents habitants, temporaires et permanents.

    Ce processus amène Kadri, Khomsi et Bondarenko à définir cinq projets distincts mais interconnectés : « Ces projets, à la fois différenciés mais concourant à la formation d’un projet intégré, renvoient à des dimensions diverses. Ainsi, nous distinguerions 5 projets liés organiquement entre eux : un projet anthropologique (vision des leaders, motivation des touristes), un projet économique (marché, produit touristique), un projet d’aménagement (mise en tourisme des espaces), un projet de gestion (mécanisme d’organisation et de gouvernance), un projet urbain (projet sociétal) » (p. 23-24).

    Les destinations touristiques gourmandes peuvent être identifiées comme des destinations touristiques « thématisées » par le « gourmand », pour lesquelles le rayonnement et l’attractivité touristiques reposent sur le « gourmand » qui est ainsi le motif du déplacement touristique.

    Pour la géographe Maria Pilar Leal Londono : « Il convient de dire également que la relation qui existe entre la gastronomie comme produit touristique et la
    destination touristique est synergique, car la destination fournit l’alimentation, les recettes, les chefs et les aspects culturels qui font la gastronomie un produit
    idéal à consommer pour les touristes (Fields, 2002 ; Richards, 2002 ; Scarpato, 2002) » (2015, p. 11).

    En 2013, Etcheverria et Scheffer tentent de caractériser les conditions nécessaires du passage d’un lieu gourmand à une destination touristique gourmande. Les auteurs mettent en avant 4 caractéristiques :

    • Il est projeté comme gourmand par les touristes
    • C’est un lieu de confrontation entre le microcosme et le macrocosme
    • Il est impulsé, valorisé et promu du point de vue touristique par un acteur central
    • Il a subi une transformation touristique

    (Etcheverria et Scheffer, 2013 ; Etcheverria 2016)

    La journée d’étude entend poursuivre cette réflexion afin d’appréhender les processus d’émergence et de construction des destinations touristiques gourmandes.

    Il s’agit en effet d’investiguer les dynamiques géographiques en cours, à différents niveaux d’échelle, du ponctuel au zonal.

    1. Dynamiques ponctuelles des destinations touristiques gourmandes

    À l’échelle géographique infra, le Guide Michelin note que le restaurant 3 étoiles « vaut le voyage » tandis que le 2 étoiles « vaut le détour ». Plusieurs auteurs (Etcheverria, 2011 ; Marcilhac, 2011 ; Clergeau et Etcheverria, 2013) ont étudié ces dynamiques ponctuelles et constatent l’effet polarisant des restaurants 3 étoiles et le rôle « central » des chefs étoilés qui, par la création d’une « atmosphère gastronomique » (Clergeau et Etcheverria, 2013), mettent en place les conditions nécessaires au développement local. Lieux isomorphes, homothétiques, les restaurants 3 étoiles peuvent ainsi être compris comme des centres rayonnants, attractifs et structurants, d’un point de vue touristique et gourmand.

    Une autre dynamique ponctuelle est celle de certaines villes touristiques qui sont animées par un « bouillonnement », une « effervescence » gastronomiques, dont le positionnement géographique relatif au niveau mondial repose sur sa gourmandise, son identité gourmande. Clergeau et Etcheverria (2021) ont ainsi étudié la « scène gastronomique » de Nantes traversée par des tensions gastronomiques grâce notamment aux actions de Richard Baussay, chargé de promotion culinaire au Voyage à Nantes.

    1. Dynamiques zonales des destinations touristiques gourmandes

    Impulsées par des chefs, des acteurs institutionnels du tourisme, mais également par d’autres acteurs comme les agriculteurs (Muller et al., 1989 ; Marcelin et Bugni, 2016) et les acteurs politiques, les destinations touristiques gourmandes révèlent également des dynamiques zonales.

    Bailly et Hussy (1991) théorisaient déjà à la fin du 20e siècle, une « diagonale gourmande », qui suivait l’axe touristique de la Nationale 7, partiellement recréée par le récent projet de Vallée de la Gastronomie. Aujourd’hui, la géographie des restaurants 3 et 2 étoiles dévoile la nouvelle configuration d’un « arc gourmand », méditerranéen, allant de Fontjoncouse à Menton en passant par Marseille et Monaco (Etcheverria, 2019, page 151).

    À une échelle plus petite encore, le « gourmand » devient une ressource essentielle dans la recherche de diversification touristique des pays de Savoie. Courchevel est ainsi la commune la plus étoilée de France au prorata de son nombre d’habitants (Etcheverria, 2019, p. 128), et les pourtours du lac d’Annecy comptent maintenant 8 tables étoilées (Boutain et Etcheverria, 2021). Megève, quant à elle, se positionne depuis 2019 comme la capitale de la cuisine de montagne grâce notamment à l’événement gourmand Toquicîmes

    Ces dynamiques ponctuelles et zonales sont le résultat de décisions, de choix, de jeux d’acteurs. Il s’agit dès lors d’observer les co-constructions des destinations, au travers des projets et stratégies des acteurs, y compris les touristes et de saisir les discours et les imaginaires du tourisme et de la gastronomie inhérents aux décisions prises par les acteurs.

    1. La co-construction des destinations touristiques gourmandes

    Les destinations touristiques gourmandes sont des concentrations de projets, de pratiques et de représentations sociales émanant d’acteurs privés, publics, parfois associatifs, des sphères touristiques et/ou gourmandes mais aussi des touristes.

    La journée d’étude sera l’occasion de revenir sur la nature des relations entre les différents acteurs de la co-construction. Les destinations touristiques gourmandes résultent des effets de proximités géographiques d’abord puis d’une volonté stratégique de s’organiser. Aux seules proximités géographiques s’ajoutent en effet des proximités organisationnelles et décisionnelles (Dupuy et Torre, 1998 ; Rallet, 2002 ; Angeon et Callois, 2005) qui permettent la mise en place des conditions nécessaires au développement local (Etcheverria, 2011 ; Clergeau et Etcheverria, 2013 ; Etcheverria, 2019 ; Clergeau et Etcheverria, 2020 ; Etcheverria, 2020 ; Clergeau et Etcheverria, 2021).

    Ces projets traduisent une rencontre entre projets d’entreprise et projets mobilitaires des touristes. Les décisions, choix et jeux des habitants permanents et temporaires participent du façonnage des destinations touristiques gourmandes.

    4. Des imaginaires du tourisme et de la gastronomie au service des destinations touristiques gourmandes

    La co-construction des destinations touristiques gourmandes contient une dimension imaginaire, celle des imaginaires du tourisme et de la gastronomie. Gravari et Graburn (2012) évoquent la création « d’un imaginaire touristique « conforme » à l’imaginaire des lieux » (p. 4). Le rôle des guides est essentiel comme le souligne Julia Csergo (2016) : « ils construisent des réputations, produisent des représentations mentales qui induisent des comportements appétitifs » (2016, p. 2).

    Mais les guides ne sont pas les seuls à participer à la production et à la diffusion d’imaginaires : « Les imaginaires touristiques sont ainsi constitués de représentations partagées, alimentées par – ou associés à – des images matérielles (cartes postales, affiches, blogs, films et vidéos, guides touristiques, brochures, magazines de voyage, mais aussi objets artisanaux et autres artefacts) et immatérielles (légendes, contes, récits, discours, anecdotes, mémoires…), travaillées par l’imagination et socialement partagées par les touristes et :ou par les acteurs touristiques (voire, parfois, per les uns et par les autres, même si le sens donné n’est pas le même » (Gravari-Barbas et Graburn, 2012, p. 2-3). Les référents culturels partagés sont également importants comme le souligne Philippe Meyzie : « il est difficile de penser que, malgré son succès, la construction d’un imaginaire gourmand des provinces ne se soit opérée qu’au travers de la littérature de voyage. On peut légitimement penser que ce processus peut prendre d’autres formes et que bon nombre de voyageurs étaient finalement déjà imprégnés de références dans ce domaine » (2013, p. 24).

    Université Angers
    Pilotes du projet : Piloté par Olivier Etcheverria, UFR ESTHUA Tourisme et Culture de l’Université d’Angers
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  • Projet Oenobiotour, projet financé par le RFI Angers TourismLab.

    En Val de Loire, les enjeux liés à l’économie du tourisme viti-vinicole sont fondamentaux, autant pour l’accroissement de la fréquentation touristique, la préservation du patrimoine viticole, que pour la stimulation de la vente des produits vinicoles. Simultanément, la demande sociétale pour une agriculture plus durable intégrant des approches plus respectueuses de l’environnement conduisent les viticulteurs à s’interroger sur leurs pratiques viticoles. Parmi celles-ci, les actions permettant de maintenir ou de promouvoir la biodiversité et les paysages viticoles dans les vignobles font l’objet d’une attention particulière dans plusieurs appellations. Il est, de ce fait, légitime pour les acteurs viticoles de s’interroger sur la valorisation possible de ces initiatives auprès des touristes.

    Pour se faire, le projet OENOBIOTOUR étudiera la perception de touristes et oenotouristes face aux pratiques favorisant la biodiversité. Il cherchera également à comprendre comment les vignerons d’une appellation se saisissent des questions de biodiversité et comment ils envisagent son exploitation dans le cadre oenotouristique .Sa finalité sera d’aider les professionnels des AOC viticoles étudiées de concert avec les acteurs du tourisme, à développer des stratégies collectives et actions communes afin d’accroitre les opportunités en termes de marché ou de valorisation de produits.

     

    ESA Université Angers
    Pilotes du projet : F Jourjon et R Symoneaux – Usc GRAPPE ESA – INRA
    Partenaires : Avec Cécile Clergeau (Université de Nantes), Julia Csergo (Université de Lyon et UQAM) et Raquel
  • Projet DETOURGO, projet financé par le RFI Angers TourismLab.

    Les destinations touristiques gourmandes : construction et organisation

    Résumé :

    Les produits agricoles alimentaires, les cuisines et les gastronomies sont devenus depuis une quinzaine d’années des arguments de plus en plus désirés et motivés pour le choix des destinations touristiques, aussi bien en France que dans le Monde. Dans certains cas, ces attributs gourmands des régions ou des villes touristiques constituent une composante essentielle du déplacement touristique. Il s’agit alors de découvrir un Autre dans son Ailleurs par ce qu’il y mange et boit, par une approche expérientielle gustative et gastronomique. Les pratiques du hors-quotidien dans un espace du hors-quotidien des touristes dessinent alors ce qu’il est possible d’appeler des destinations touristiques gourmandes. Comment se constituent-elles ? Comment se structurent-elles ? Comment se développent-elles ? Quels sont les jeux d’acteurs ? Quels sont la place et le rôle des touristes et des (grands) chefs cuisiniers ? Comment la dimension immatérielle et les imaginaires de la gastronomie jouent-ils dans l’émergence des destinations touristiques gourmandes ?

    Université Angers
    Pilotes du projet : Piloté par Olivier Etcheverria, UFR ESTHUA Tourisme et Culture de l’Université d’Angers
    Partenaires : Avec Cécile Clergeau (Université de Nantes), Julia Csergo (Université de Lyon et UQAM) et Raquel
  • L’entomophagie en Occident : perspectives de recherche

    En occident, manger des insectes comestibles s’inscrit dans une perspective d’alimentation saine et durable visant à satisfaire la demande alimentaire croissante tout en préservant l’environnement. Il s’agit d’accompagner les transitions nutritionnelles liées aux changements globaux en cours. Cela implique une évolution des comportements et passe par une meilleure connaissance des déterminants sociaux, culturels, psychologiques et sensoriels des préférences et pratiques alimentaires. Cette recherche propose de les étudier afin d’identifier des pistes d’innovations pour les entreprises agro-alimentaires qui souhaitent délivrer des aliments aux qualités sanitaires, sensorielles, nutritionnelles et fonctionnelles, et des stratégies vis-à-vis des politiques publiques et des réglementations pour accompagner ces évolutions de modes de consommation.

    L’entomophagie (fait de manger des insectes) est une pratique répandue en Afrique, Asie, malgré un déclin lié à une occidentalisation des régimes alimentaires (van Huis et al., 2013). En occident, elle a été progressivement abandonnée au profit de l’élevage de bétail pour des questions culturelles (Much, 2012). Les insectes sont pourtant une alternative saine pour les populations des pays développés et une solution contre la faim pour les populations sous-nutries ; pour cela, sa consommation est soutenue par la Food and Agriculture Organization (FAO) (van Huis et al., 2013). Même si le fait de manger des insectes tend à croître dans le monde occidental, cette consommation reste marginale et expérientielle car ils y sont mentalement catégorisés comme « culturellement non comestibles » (Fischler, 1990) ; ils cristallisent les trois motifs de refus alimentaires identifiés par les sociologues, à savoir le danger, l’aversion et le dégoût (Rozin et al., 2008). L’enjeu majeur est alors de familiariser les consommateurs aux insectes pour réduire les aversions liées au goût, et modifier les représentations mentales pour les rendre « culturellement comestibles » (Corbeau et Poulain, 2002), en réduisant le danger perçu et le dégoût. Ces trois freins font écho aux trois types d’ambivalences dans la relation entre l’homme et son alimentation : santé-maladie, plaisir-déplaisir, vie-mort (Beardsworth, 1995). Les stratégies de régulation associées pourraient favoriser l’acceptation des insectes, à savoir l’acquisition de connaissances par la communication et l’éducation, la familiarisation par exposition et association à des marqueurs gustatifs et aliments connus, la consommation sarcophage des insectes. Le regain d’intérêt des chercheurs pour les insectes comme source d’alimentation est récent (van Huis, 2013) mais les travaux restent appliqués aux secteurs médicaux et agricoles (Looy et al., 2014). Peu d’études traitent des perceptions et dimensions marketing de cette consommation, et aucune aux mécanismes psychologiques qui freinent la consommation humaine d’insectes (Gallen, 2005 ; Looy et al., 2014). Les chercheurs s’accordent sur le fait que les fondements de ce rejet doivent être étudiés, qu’il faut tenter de le surmonter, et que les consommateurs les plus susceptibles de les ingérer doivent être identifiés et ciblés (van Huis, 2013). L’objectif de cette recherche interculturelle est d’analyser les représentations mentales de l’entomophagie, les types d’insectes les moins rejetés, les formes de présentation acceptables, les groupes favorables à cette consommation, ainsi que les informations et actions pouvant favoriser leur consommation afin de proposer des pistes d’innovation aux entreprises et aux pouvoirs publics.

    Projet ANR CRI-KEE | Consommation et représentations des insectes – État des connaissances sur leur comestibilité en Europe

    Université Angers
    Pilotes du projet : Gaëlle Pantin-Sohier (Université d’Angers)
    Partenaires : Céline Gallen (Université de Nantes), Joël Brée (Université de Caen), Dolly Daou (Ecole de Design)